Plan
I- La religion, une sous-compréhension de l’univers et de l’homme ? L’enfance de l’humanité ?
A- Origine : angoisse face aux mystères de l’univers ?
B- Est-ce à dire que la religion serait liée aux débuts, pour ne pas dire, à l’enfance, de l’humanité, comme a pu le dire Comte dans sa « loi des 3 états » ?
II- La religion, non pas une connaissance, mais une morale, et un « ciment » social ?
A- La religion, une morale (Spinoza)
B- La religion, un ciment social (Durkheim)
III- Le pouvoir séparateur des religions : l’esprit religieux est-il fanatique ?
A- Message de soumission ?
B- De la foi au fanatisme
Cours
Introduction
Religion : phénomène universel car aucune société sans religion. Mais phénomène aussi sans unité puisque les religions dans le temps et l’espace ne se ressemblent pas. Certaines ont cru en l’existence de dieux, d’autres, d’un Dieu, et ces dieux ou ce Dieu n’ont pas, dans l’espace ou dans le temps, les mêmes propriétés, les mêmes règles de vie (quand elles en ont).
Deux questions directrices :
Peut-on tout de même cerner un noyau commun dans tout cela, trouver une unité dans la diversité ?
Et surtout, la religion est-elle positive ou négative pour
l’humanité ?
I- La religion, une sous-compréhension de l’univers et de l’homme ? L’enfance de l’humanité ?
A- La religion serait née de l’angoisse face aux mystères de l’univers, et serait l’expression de notre angoisse face à cet univers que nous ne comprenons pas et qui nous menace
Cf.
conscience mort : premiers rites ; questionnements à propos
de l’après décès qui mène à
première imagination de ce qu’il peut y avoir après…
(angoisse existentielle)
Cf. mythes
Cf. dieux : devant une tempête, on peut admettre qu’elle est le produit d’une colère de Neptune, résultant d’une dispute avec quelque déesse
B- Est-ce à dire que la religion serait liée aux débuts, pour ne pas dire, à l’enfance de l’humanité, comme a pu le dire Comte à travers sa « loi des 3 états »?
Comte, dans les Cours de philosophie positive, est l'inventeur du "positivisme". Il parle avant tout d'"esprit positif" ; cet état désigne l'état de l'esprit humain, à l'"âge de la science". Cet âge de la science désigne l'état de maturité de l'esprit humain. Un mot d'ordre : seule la science est une manière de penser digne de ce nom. Conséquence : tout devra être scientificisé (positivisme = scientisme).
A. COMTE, Cours de philosophie positive (1630 - 1842), Première leçon La marche progressive de l'esprit humain En
étudiant le développement total de l'intelligence
humaine dans ses diverses sphères d'activité.
depuis son premier essor le plus simple jusqu'à nos jours.
je crois avoir découvert une grande loi fondamentale,
à laquelle il est assujetti par une nécessité
invariable, et qui me semble pouvoir être solidement établie,
soit sur les preuves rationnelles fournies par la connaissance
de notre organisation. soit sur les vérifications historiques
résultant d'un examen attentif du passé. Cette
loi consiste en ce que chacune de nos conceptions principales.
chaque branche de nos connaissances. Passe successivement par
trois états théoriques différents : l'état
théologique, ou fictif; l'état métaphysique,
ou abstrait; l'état scientifique, ou positif. En d'autres
termes, l'esprit humain, par sa nature, emploie successivement
dans chacune de ses recherches trois méthodes de philosopher,
dont le caractère est essentiellement différent
et même radicalement opposé ; d'abord la méthode
théologique. Ensuite la méthode métaphysique,
et enfin la méthode positive. De là trois sortes
de philosophies. ou de systèmes généraux
de conceptions sur l'ensemble des phénomènes.
qui s'excluent mutuellement; la première est le point
de départ nécessaire de l'intelligence humaine;
la troisième son état fixe et définitif;
la seconde est uniquement destinée à servir de
transition. |
Commentaire
: Comte nous dresse ici le tableau des progrès de l'esprit
humain. Progrès dans la manière de penser, dans l'attitude
face au monde, et par conséquent, dans la manière d'agir
(d'être, dans le monde qu'il comprend de telle façon).
Ce ou ces progrès est exprimé sous la forme d'une "loi"
(il est donc nécessaire et universel), appelée "loi
des trois états". Il y a trois états de l'humanité,
et tout peuple, ainsi que tout individu, doit d'abord passer par la
premier, pour passer au second, et parvenir au terme du progrès.
Ces trois états sont les suivants :
Enfance = état théologique adolescence = état métaphysique âge adulte = état scientifique
En quoi consiste chaque étape ? Et en quoi consiste le progrès
?
Dans son enfance, l'esprit humain (à la fois celui de l'homme en général, et celui de tout individu) commence par être théologien. Il recherche alors l'origine première ou la fin dernière des phénomènes, et croit les trouver dans des intentions qui animent les objets ou les êtres (fétichisme), l'action d'êtres surnaturels (polythéisme) ou celle d'un Dieu créateur (monothéisme). L'esprit humain est anthropomorphiste : il a tendance à peupler la nature de forces ou de dieux dont il conçoit l'action sur le mode de l'action humaine, ie, comme intentionnelle (finalité naturelle).
A
l'adolescence, l'esprit humain devient métaphysicien. Aux dieux
de l'âge théologique, il substitue des principes abstraits
(exemple : la Nature, la Matière). L'esprit a progressé
car ses explications sont devenues plus rationnelles, il s'est dégagé
de l'anthropomorphisme. Mais, théologie ou métaphysique,
la démarche reste la même : il s'agit de rechercher une
causalité première et absolue du monde.
A l'âge adulte, l'esprit humain est devenu scientifique. Plus précisément, il est devenu positif. Qu'est-ce à dire ? Par le terme de positif, Comte veut dire qu'il est devenu relatif : ie, il a renoncé aux explications absolues, théologiques ou métaphysiques, et son mode de pensée est celui des sciences expérimentales : il observe les faits, repère les relations constantes qu'ils ont entre eux, ie, les lois, et ne cherche plus à connaître les causes premières (sous-entendu : elles sont inaccessibles). Exemple : la loi de la gravitation de Newton ne dit rien sur l'origine ou la cause première (ultime) des phénomènes gravitationnels; elle se contente de dire quelles relations constantes existent, pour les corps, entre leur masse et leur distance.
Qu’ils soient grecs ou hindous, les dieux ne sont que les produits de l’imagination des hommes ; ils permettent de répondre facilement aux interrogations que nous formulons face aux événements qui nous entourent ; mais ce n’est pas une véritable explication des mécanismes du monde réel (explication de la tempête : le résultat d’une baisse de la pression atmosphérique, provoquée par tel changement survenu ailleurs) Ici par conséquent, on définira le phénomène divin = tout phénomène que nous renonçons à comprendre. L’esprit religieux serait donc irrationnel… Cf. balbutiements d’explication de la réalité, pré-science…
Transition : De toute façon, interroger la religion de cette manière, c’est la mesurer à l’aune d’un critère qui ne peut que la mener à la dévaloriser (la science, la connaissance). Or, la religion ne relève-t-elle que de notre besoin d’expliquer le monde ? Dans ce cas-là, pourquoi opposerait-on alors mythe et religion ? Religions polythéistes et religions monothéistes ont-elles un noyau commun ? (je répondrai sans doute : le mystère seulement !)
II- La religion, une morale ? un ciment social ?
A- La religion, une morale
Que trouve-t-on dans les religions monothéistes, quand on passe des dieux à Dieu ?
- des croyances relatives à Dieu (création ex nihilo, incarnation, résurrection.. )
- pas but théorique mais pratique : vie éternelle et le
salut
- rites : pratiques collectives codifiées par une Eglise (interdits ; rites commémoratifs = rattachent le groupe à son passé mythique, historique, à son père fondateur, etc. ; expiatoires, cf. le deuil = fonction cathartique)
Présence d’une Parole, révélée à certains élus. Jésus, Mahomet.
-
cf. Jésus : projet de société
- éthique chrétienne = prône une morale du respect
et de la fraternité
- sentiment d’appartenir à une même communauté
humaine
Pourquoi les paraboles ? Parce que, cf. cours sur l’art, le divin ne peut être exprimé sous formes de concepts… Permettent de donner un « visage » à l’inconnu et au sacré. Peut-être aussi la morale est-elle trop éloignée de nos autres aspirations humaines, et alors si on a l’espoir que celle-ci nous rende heureux, et nous donne la vie éternelle, alors c’est rassurant !
De toute façon, la rleigion, si on la compare par exemple au droit, est bien plus "moralisante" que les lois édictées par l'Etat ! En effet, on obéit souvent aux lois positives (cf. cours et fiche droit) par intérêt, mais si on obéit aux lois édictées par Dieu, ce doit être par pureté de coeur ! La religion nous habitue donc à faire le bien par amour du bien, ce qui rejoint la définition de la morale !
B- La religion, un ciment social
Si la religion dicte à l’homme certaines règles de conduite, si elle lui indique comment bien conduire sa vie, à la fois pour être heureux, et pour être bon (l’un ne saurait aller sans l’autre), il faut aussi insister sur son aspect proprement social. Là où il y a règles de vie, il y a toujours société. Mais surtout, la religion a un pouvoir d’unification sociale. Il y aurait esprit religieux partout où au bout du compte, ce qui est sacré, c’est la société, et l’humain…
Durkheim, Les Formes élémentaires de la vie religieuse (1912) Extrait n°1 : définition de la religion :
Extrait n°2 : la religion, instrument d’unification sociale :
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Questions
:
1) Comment D. définit-il la religion ? Qu’est-ce qu’il juge essentiel et intemporel, qu’est-ce qu’il juge secondaire et variable ?
2) Pour D., il n’y a pas de différence essentielle entre
les cérémonies religieuses et les cérémonies
civiles. Etes-vous d’accord avec cette idée ?
Problème de cette thèse : enlever Dieu
de la religion, chercher des credo minimum qui soient rationnels, comme
ont voulu par exemple le faire Kant ou Spinoza, c’est trouver une
religion qui n’a rien à voir avec la foi… C’est
se débarrasser de trop de choses !
III- Le pouvoir séparateur des religions : l’esprit religieux est-il fanatique ?
Alors retour en quelque sorte à I, cette fois en disant que c’est
une fausse ou une sous-morale, dangereuse, potentiellement, pour l’humanité
?
A- La morale religieuse a pour spécificité d’être liée à un être transcendant l’homme
- message de soumission et atteinte à la liberté : risque d’hétéronomie ? (c’est quelqu’un d’autre que nous qui nous impose l’obéissance à la loi morale ! c’est parce qu’elle vient de Dieu qu’il faut y obéir !)
B- La spécificité de la croyance religieuse : de la foi au fanatisme
- risque de fanatisme : on est sûr de posséder la vérité, et on ne se pose plus de questions (cf. distinction croyance et foi : la croyance, absence de preuves suffisantes, admet le doute, pas la foi)
- la foi, contrairement à la raison, refuse le verdict de l’expérience (cf. Popper) : dogmatique
- problème : comme symbolisme, est sujet à de multiples interprétations, et sera expliqué par ceux qui savent = risque de manipulation
- risque d’idôlatrie : de se consacrer seulement à Dieu au point d’en oublier d’aimer les hommes … de se consacrer, également, seulement aux rites, prières, habillement, etc., au point de détester ceux qui ne font pas ou qui ne sont pas comme nous !
C- A qui la faute ? Est-ce la religion ou l’homme qui est mauvais(e)?
- mais ne serait-ce pas une déformation toute humaine ??? quand la religion tombe dans les mains de ceux qui veulent dominer les autres, la religion est dangereuse, mais finalement ce sont les hommes eux-mêmes qui sont une menace les uns pour les autres
(alors que le véritable message serait le caractère sacré de l’homme ?)
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