Le silence ne dit-il rien ?

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Introduction
• "silence" : absence de bruit ou de discours. Le silence se comprend comme silence extérieur, par rapport à un environnement bruyant. Dans un hôpital on demande le silence par rapport au bruit des objets que l'on transporte, de la musique, mais aussi des paroles à trop haute voix qui dérangent la tranquillité des malades. Le bruit est compris alors comme nuisance. Mais on peut aussi parler de silence intérieur, par opposition à un bruit contenu dans l'esprit. On peut avoir un vacarme constant de musique et pensées inutiles dans l'esprits, un verbiage ininterrompu qui n'est qu'un gaspillage d'énergie psychique qui rend la pensé très confuse. On peut aussi distinguer le silence, sous son aspect sain et libérateur, dans la vie courante et dans la vie de l'esprit et le mutisme, qui est une forme de silence qui résulte d'une incapacité ou d'une impossibilité d'expression. Une personne qui n'a pas suffisamment de culture peut, dans une conversation où elle se sent dépassée choisir de se retrancher dans le mutisme. Dans des situations très crispées, il y a toujours des non-dit très évocateurs ; on étouffe, et si en apparence on ne dit rien, ce n'est pas parce que l'on à rein à dire, ce mutisme est chargés de sens, des reproches, des haines retenues, des tensions exacerbées etc.
• "dit-il" : dire signifie exprimer, signifier, faire connaître, ce qui renvoie nécessairement à un contenu. Dire, c'est toujours dire quelque chose, émettre une intention de signification. Mais la question est formulée comme si ce sujet qui parle, à qui on s'adresse était le silence. On demande si le silence a quelque chose à dire ! donc s'il exprime un sens, ou bien si, conformément à sa définition, il n'exprime rien.
Problématique : peut-on signifier quelque chose sans parole ? le langage suppose-t-il obligatoirement l’utilisation de la parole ? Ou bien peut-on parler de langage au sens général du terme ? Et d’ailleurs, le silence ne serait-il pas supérieur au langage articulé, conceptuel, qui ne parvient pas, comme on le verra, à tout dire, tout exprimer ?

I- Le silence, une absence de communication et de sens : pour communiquer et exprimer quoi que ce soit, il faut recourir au langage qui d’ailleurs est le signe de notre liberté, le propre de l’homme : refuser d’utiliser le langage est alors refuser notre humanité elle-même !
• Analyse du silence, non pas vraiment comme absence de bruit, mais comme absence de mots, de paroles : c’est alors l’impossibilité de tout échange véritable (cf. en effet analyse de la notion de communication, non pas au sens technique du terme, mais au sens « humain » du terme)
• Parler est le propre de l’homme,
i. Cf. Aristote, texte dans lequel il affirme que l’homme est un animal politique
ii. Cf. aussi la différence entre le langage des abeilles et le langage humain : le caractère libre, volontaire, illimité, du langage : on ne voit pas pourquoi on ne recourrait pas au langage qui est le moyen le plus propre, le mieux à même, de transmettre tout ce qu’on veut, nos pensées, des idées générales, etc.
iii. Mais surtout ne pas recourir au langage articulé c’est dire non à notre humanité, comme le dit Aristote, c’est alors être un animal ou un dieu… (cf. fait que certains recourent au silence pour rompre tout dialogue, toute communication)

II- Mais le langage articulé, conceptuel, est-il si parfait que cela, à la fois pour communiquer et pour comprendre (les autres, le monde), donc, pour exprimer tout ce que je veux transmettre aux autres ? Et dès lors pourquoi ne pas recourir à un autre mode d’expression ? Et au nombre de ces modes d’expression, le silence n’en serait-il pas un ?
• Critique du langage : cf. Nietzsche et Bergson : le caractère conceptuel du langage signifie certes son utilité (on ne peut passer son temps à décrire les caractéristiques détaillées de chaque chose, et surtout, on ne pourrait pas communiquer entre nous si chaque chose individuelle avait un nom propre !) mais aussi son imperfection :
o A décrire la véritable nature du réel
o A décrire la profondeur, l’intimité, de nos sentiments
• Autant Nietzsche que Bergson privilégieront l’art comme moyen d’échapper au caractère social et commun du langage : plutôt que le concept, par exemple, l’image…
• Pourquoi pas alors dire aussi : plutôt que le concept, le silence ? Quoi de plus fort et de plus intime qu’un regard « expressif » ? Et notre corps, nos attitudes, nos gestes, etc., ne sont-ils pas tout un langage secret mais aussi intime, qui en révèle beaucoup plus sur nous que les paroles que l’on peut prononcer ? ET quelqu’un qui adopte le silence dans certaines situations, ne veut-il pas « dire » quelque chose qu’il ne parvient pas à exprimer ? Le silence, dans ce cas, est en général une rupture, il veut dire : « je n’ai plus envie de communiquer », « le dialogue ne servirait à rien entre nous » (et cela peut être positif, cf. alors peut-être le refus de recourir à la force)

III- Si certes le silence comporte tout de même de l’équivoque, et n’est pas une communication parfaite, reste que le langage est quelque chose de plus large que le seul langage articulé, et que, par conséquent, le silence peut être considéré comme ayant une signification, même si cette signification est difficilement déchiffrable…
Problèmes posés par II :
• on confond souvent, finalement, dans l’analyse précédente, le silence avec la pensée, avec l’image, etc. : certes il n’y a pas de parole, mais il n’y a peut-être pas de bruits, mais avouons tout de même que le silence dont on parle ici n’est pas le « silence en soi » !
• de plus, cette forme d’expression, de communication, n’est-elle pas équivoque ?
o Car peut-on vraiment comprendre l’autre ? (cf. cours autrui et la connaissance que j’ai de l’autre par analogie, donc, à partir de moi-même)
o Et le signe n’est-il pas toujours ambigu, sujet à de multiples interprétations ? (cf. textes religieux, etc.)
• Accordons tout de même, pour répondre à notre problématique, que le langage n’est pas seulement articulé, il y a langage à partit du moment où on est dans le domaine du signe, du symbole ; ainsi peut-on dire que les animaux parlent, que la nature exprime ou signifie (cf. fièvre et maladie) donc « dit »…


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