Introduction
Livres
sur lesquels vous pourrez être interrogés : livres
I, II, livre IV pp. 188-199, début VII (jusqu’à
page 279). Mais il est important de connaître le plan par
cœur, et de savoir ce qui se dit avant et après ces
livres, donc, de faire un résumé.
A-
Le dialogue dans l’œuvre
- dialogue
de la « mâturité »
- on y trouve tout : son explication de la nature humaine, sa théorie
des Idées, qui est à la fois une thèse épistémologique
(qu’est-ce que connaître ?) et ontologique (qu’est-ce
que la réalité ?), une morale, une politique, etc.
- important pour comprendre l’œuvre de Platon car on
y trouve le fil directeur de son œuvre (liens politique et
philosophie, savoir et morale)
B-
Le fil directeur : liens politique et philosophie.
Conséquences
:
1) parler de liens politique et philosophie, c’est aussi lier
la politique à la morale. La politique n’a pas pour
fonction de contraindre les gens à obéir aux lois
contre leur gré, mais doit les éduquer au bien, ie,
à faire le bien par amour du bien.
2)
cela a également pour conséquence une représentation
non démocratique de la vie politique ; si le peuple doit
être éduqué, il le sera par les philosophes,
seuls à même de le faire
Parler
de politique, on le voit, c’est toujours faire des hypothèses
sur la nature humaine…
C-
Le plan de la République
I et
II : nature et origine de la justice
• I : nature
• II : faut-il être juste ? cela mène-t-il au
bonheur ?
III
et IV : la cité idéale
• III : surveillance des artistes ; noble mensonge : le mythe
de la terre ; l’éducation des jeunes gardiens de la
cité
• IV et V : communisme
Fin
V, VI, et VII : condition de possibilité de cette cité
idéale : le philosophe-roi (justice et bien, savoir et bien)
• V et VI : le naturel philosophe
• VII : l’allégorie de la caverne ; l’éducation
du naturel philosophe (ou, programme d’études)
VIII
à X : typologie des régimes politiques, et éléments
qui détruisent la cité idéale
• VIII : comment la cité idéale se corrompt
; critique de la démocratie
• IX : le tyran
• X : L’art corrupteur ; le mythe d’Er (379 sq.)
D-
Les personnages
• Céphale : père de Polémarque, Lycias
et Euthydème ; étranger, qui ne participe pas à
la vie politique athénienne ; honnête
• Polémarque : a étudié la rhétorique
mais, déçu, s’est consacré à la
philo ; fut condamné à boire la cigüe 5 ans avant
Socrate
• Thrasymaque : sophiste
• Adimante et Glaucon : frères de Platon (l’un
courageux et l’autre philosophe)
I- Un constat : les hommes ne font
pas le bien de leur plein gré, et cela, par ignorance (intellectualisme
moral) ; si on ne les éduque pas, ils feront ce qui va contre
leur propre bien, et seront à l’origine de leur propre
malheur (sous-entendu : la justice et le bonheur vont de pair)
A-
La justice est-elle le bien suprême ? les justes sont-ils
plus heureux que ceux qui sont injustes ?
1)
Rappel : dans le livre I, la discussion a tourné autour de
la question de savoir ce qu’est la justice ; selon Thrasymaque,
la justice est seulement l’intérêt du plus fort.
Le
livre I, et donc la République, commence dans une réunion
qui a lieu chez un riche athénien. Se trouvent réunis
: Thrasymaque, Socrate, Adimante, Glaucon, et Céphale. Leur
discussion tourne autour de la question de savoir ce qu’est
la justice.
Problème
qu’ils posent, et qui se pose à propos de cette notion
:
Justice
: action louée dans une société. Mais louée
pourquoi ? Parce que c’est l’action bonne ? Ou bien
seulement règle que tout le monde doit suivre si on veut
vivre en société ? Est-ce seulement par nécessité
qu’il faut louer la justice, ou bien est-ce parce qu’elle
est bonne en soi ?
a)
avant de lire le texte : généralités sur
la notion de justice
Ambiguïté
de la notion : la notion de justice se situe aux confins de la politique
et de la morale.
On
parle d’institution de justice, on parle de justice légale,
entendant par la les lois existant au sein d’une société
afin de l’organiser et afin que les gens ne fassent pas n’importe
quoi n’importe comment (bref, pour que les libertés
puissent coexister) –la justice est alors entendue au sens
de droit.
Mais
on parle également de la justice comme d’un principe
idéal, comme étant ce qui permet de juger de la légitimité
d’une loi, d’une institution. En ce sens la justice
est entendue, non comme légalité, mais comme principe
d’égalité.
Parler
d’égalité nous montre que la justice a toujours
à voir avec la répartition des biens communs, des
richesses, au sein d’une collectivité. L’idéal
: que personne ne soit lésé…
En
philosophie politique, et même finalement dans l’histoire,
il y a un débat à propos de la question de savoir
si une loi n’est juste que parce qu’elle est légale,
ou bien si elle n’est juste que si elle est conforme à
certains principes moraux.
Cf.
positivisme juridique, tel qu’il est par exemple formulé
par Hobbes : « ce n’est pas la vérité
qui fait la loi mais l’autorité ». Principe ou
thèse à la base du nazisme ! Si on me l’ordonne,
je fais… Le bien est défini par celui ou ceux qui font
les lois.
b)
Les différentes conceptions de la justice défendues
par les protagonistes du débat
•
Remarque préliminaire ou question de forme :
Il
faut préciser que le livre I diffère du reste de l’ouvrage
en ce qu’il est un dialogue, et conforme à l’esprit
de ce qu’on appelle le dialogue socratique, alors que les
autres livres seront plutôt des monologues.
Ainsi,
Socrate fait intervenir un ou des personnages censés avoir
une certaine qualité morale, et il les met en difficulté,
en montrant qu’ils ne peuvent aller bien loin dans l’approfondissement
théorique de cette qualité morale. Ici, c’est
en l’occurrence une discussion avec un homme riche qui croit
que les richesses aident à être juste qui va provoquer
un débat sur la justice. Ce débat va dévoiler
la fausseté radicale des opinions communément admises
au sujet de celle-ci.
Les
opinions leur sont ôtées, sans qu’il y ait rien
à leur place (aporie). On conclut donc qu’on est toujours
dans l’obscurité quant à la nature de la justice
! Ici, Socrate est donc l’emmerdeur qui a le défaut
de ne rien savoir !
Avantage
: montrer que la discussion philosophique n’est pas «
abstraite », mais dévoile nos insuffisances. Il s’agira
ici de partir du monde réel, et d’essayer de résoudre
ses imperfections.
•
Céphale : « pour moi, le juste, c’est ce que
j’ai reçu de mes parents, augmenté du fruit
de mon propre travail » ; « la justice consiste à
rendre à chacun ce qui lui est dû »
Problème
: mais qu’est-ce qui est dû à chacun ? doit-on
par exemple rendre un dépôt à quelqu’un
qui n’a plus sa raison ? Dans certains cas, il semble que
donner à un homme ce qui lui appartient, est nuisible : tous
les hommes ne font pas bon usage de leur propriété
•
Polémarque : « à donner à chacun ce qui
est bon pour lui » ; « à faire du bien à
ses amis »
Problème
: la justice consiste alors à faire du mal à ses ennemis
? la justice = une sorte d’art de la guerre…
La
question qui est née est celle de savoir si la justice est
exercée pour le bien de celui qui l’exerce seulement,
ou bien pour celui qui la « reçoit ». Ce qu’on
ne remet pas en question : que la justice soit un bien.
•
Thrasymaque :
T.
va entrer alors en scène et faire comme si le bien était
la même chose que l’intérêt. Il va également
faire comme si cela allait de soi que la justice était quelque
chose de politique plutôt que de moral. On va voir que pour
lui la justice n’a rien de positif.
Idées
soutenues par T. :
- on
obéit toujours à son détriment
- ceux qui blâment l’injustice le font par crainte de
la subir, mais ils n’hésiteraient pas à la commettre
s’ils pouvaient le faire en toute impunité
- présupposé
de ces arguments : la justice est seulement ce qu’édicte
celui qui commande ; or, on commande toujours à son profit
; il n’existe donc pas de justice en matière politique
et ce que l’on appelle « juste » n’est pas
« bien en soi », c’est juste l’intérêt
de celui qui a le pouvoir
La
conception de T. rejoint plus ou moins celle selon laquelle la justice
coïnciderait avec l’appareil légal et judiciaire
(cf. positivisme juridique : n’est juste ou injuste que ce
qu’ordonnent les lois positives, instituées par les
hommes) ; rien à voir avec l’idée morale de
justice, la vertu de justice. (Si par conséquent la justice
est mauvaise, c’est parce qu’elle ne correspond à
aucun bien « naturel » ; le bien naturel sera pour lui
s’épanouir en tant qu’individu).
•
Socrate :
o Le
gouvernant ne gouverne pas à son avantage
Premier
argument :
(1)
ni l’art ni la technique n’incluent l’idée
qu’on retire un bénéfice personnel de leur exercice
(2) pourquoi ? car l’art de gagner de l’argent est un
art distinct, donc, ne peut se trouver dans l’art en général
ou considéré en lui-même
(3) donc, les gouvernants ne gouvernent pas dans leur intérêt
propre car s’ils retirent quoi que ce soit de leur manière
de gouverner, ce n’est pas en tant que gouvernants
Deuxième
argument : l’art de gouverner ne procure pas grand plaisir
!
o aucune
société ne peut durer sans justice entre ses membres.
Elle
entretient la concorde et l’amitié. Elle permet d’agir
de concert, de mener une affaire en commun. L’homme injuste
ne peut donc régner sur aucune cité puisque cela exclut
toute coopération (donc pas de cité). Cf. 352a5-8
: l’injustice divise les groupes, et les individus.
La
justice sera pour lui l’art d’attribuer d’une
part ce qui est bon pour l’âme de chacun, et d’autre
part, ce qui détermine le bien commun de la cité.
(Peut-être ici parler de l’identité bien commun/
bien individuel chez les Anciens ? Ce qui permettra de comprendre
que dans le livre II, on se demande si la justice favorise le bonheur,
non seulement de la cité mais aussi et avant tout de l’individu
–mais c’est qu’il faut convaincre les hommes que
la justice est un bien si on veut qu’ils y obéissent
avec conviction, sinon, ils commettront, dès qu’ils
le pourront, l’injustice)
o la
justice est bonne pour celui qui l’exerce
Argument
que l’on va analyser en début de notre deuxième
partie ; il convient de remarquer ici que par cette critique, Socrate
déplace le débat de manière radicale, et s’oppose
à la fois à Céphale, Polémarque, et
Thrasymaque. La justice n’est pas la bonne action, la conformité
avec certaines règles de conduite élémentaires
(C et P), ni la conformité aux lois.
Pour
Socrate, il convient d’analyser de plus près ce que
veut dire exactement agir de façon juste : pour cela il faut
s’interroger sur les effets induits sur l’âme
de celui qui l’exerce. C’est une interrogation morale
et non plus « positiviste ».
Deux
questions vont donc à partir de là s’entremêler
dans tout l’ouvrage :
1)
l’art de gouverner, la politique, est-il ou non relié
à un principe moral, comme la justice ? l’art de gouverner
profite-t-il à celui qui commande, ou à ceux qui obéissent
?
(cf. dès la fin du livre I, Socrate dit à T. que tout
art s’exerce, non dans l’intérêt de celui
qui s’exerce, mais de celui… cf. art du médecin,
art du berger : a pour essence le bien des moutons)
2)
la justice est-elle un bien en soi ? profitable à la cité
comme à l’individu ?
On verra que Platon va chercher à répondre par la
positive à ces deux questions, et que pour lui, par conséquent,
la politique sera une entreprise morale : il s’agira de rendre
les hommes meilleurs, capables d’être justes et d’agir
moralement de leur plein gré, et non sous la contrainte
2)
Livre II : la morale eudémoniste
a)
bien et bonheur (la morale eudémoniste)
Question
: la justice est-elle un « bien en soi » ?
-qu’est-ce
que le bien ? cf. bien et bonheur ; vertu et fonction
cf.
livre I, 350c-354a : chaque chose a sa fonction et une vertu propre
qui lui permet de remplir avantageusement cette fonction ; âme
= vertu = justice ; donc, sera heureuse grâce à elle
- vie
bonne = vie heureuse ; pourquoi ? parce que le bien est ce que nous
recherchons de manière ultime, ce en vue de quoi nous faisons
tout ce que nous faisons ; et le bien coïncide avec l’accomplissement
de notre fonction
- justice
et bien : vertu, pas justice institutionnelle ; justice lien avec
bien : veut d’abord dire que c’est ce qui nous rendra
heureux (cf. livre VI : la connaissance de ce qu’est la justice
sera liée à une science suprême, science de
Bien ; or, comment est défini le bien ? comme ce en vue de
quoi nous faisons tout ce que nous faisons ! cf. p. 263)
NB
: dire ici que chez Platon, on peut parler de justice individuelle,
à l’intérieur d’un individu : vivre de
façon juste peut également être bien pour nous,
pas seulement pour les autres ou pour l’ensemble de la cité.
De toute façon ce qui caractérise l’ensemble
de la cité rejaillira sur nous (ou le dire au début
?)
b)
Début du livre II : les interventions de Glaucon et Adimante
: il faut changer de méthode afin de résoudre le problème
de la nature de la justice
NB
: le début du livre II constitue une transition entre le
livre I et les autres livres. Destinée à montrer que
la méthode de Socrate n’est pas la bonne. (cf. joute
oratoire !). « Tu n’as pas bien argumenté ».
b1)
Problème posé par cet argument : c’est par
là que commence le livre II
•
Quel est ce problème ?
o Socrate ne dit pas que la fonction de l’âme est de
diriger, guider, le corps
o Si la vertu de l’âme est de bien vivre on ne voit
pas du tout en quoi ce serait la justice qui permettrait à
l’âme de bien vivre : c’est une pétition
de principe !
•
C’est pour cette raison qu’au début du livre
II, on voit Glaucon critiquer l’argumentation de Socrate :
il faudra tout recommencer depuis le début, car si Socrate
a bien convaincu du fait qu’il fallait déplacer le
problème vers une interrogation sur la personne juste, et
sur la question de savoir si la justice est un bien en soi, Socrate
a échoué. Or, la question est d’importance.
b2)
Glaucon et Adimante
Ils
vont donc continuer là-dessus en disant que cela rejoint
l’opinion commune : les hommes sont convaincus que si l’on
doit obéir à la justice, c’est seulement parce
que les lois nous l’imposent. On considère que ce n’est
pas bien en soi.
.
• Glaucon (jusqu’à 362d)
o Argument
du début : quelle sorte de bien est la justice ?
La
justice sera désirable en elle-même mais aussi pour
ses conséquences (en cela, ce n’est pas une thèse
utilitariste). Cf. santé, vue.
Précisons
que Glaucon va insister sur la justice prise en elle-même,
et Adimante, sur les résultats bénéfiques de
la justice.
o Anneau
de Gygès.
Cet
anneau avait le pouvoir, lorsqu’on tournait le chaton en dedans,
de rendre son porteur invisible. Peu d’hommes seraient assez
forts pour se retenir de commettre des injustices s’ils étaient
assurés de le faire incognito et en toute impunité
On estime que la justice n’est pas un bien en soi, pas bien
pour nous, mais utile, nécessaire, si on ne veut pas se voir
puni par la société, c’est tout. On obéit
au juste par crainte des sanctions et de la réprobation publique
; pour la considération et les avantages qu’elle nous
procure. Justice et intérêt se confondent donc au point
que plus personne n’est juste volontairement mais seulement
par contrainte . On se dit que rien à voir avec bonheur !
Mais plutôt = satisfaire tous nos désirs !
•
Adimante (362e-368a)
Transition
: Pour reprendre les critiques adressées à Socrate
au livre II, il faut noter que l’apologie de la justice va
dorénavant se baser sur une théorie de la nature de
la personne humaine, et sur la nature de la société.
Pour comprendre son argumentation, il faut donc avoir en tête
ce qu’est la personne ou l’âme humaine selon Platon,
ainsi allons-nous anticiper la lecture et aller voir ce qu’il
dit à la fin du livre IV, avant d’aborder la suite
de la lecture du livre II….
B-
Pourquoi l’homme commet-il le mal plutôt que le bien
? cf. livre IV 436c-444a
- nous
ne voyons pas toujours où est notre véritable bien
que nous confondons avec le plaisir
- à
cause de quoi ?
- homme : composé d’âme et de corps ; l’âme
est le principe de commandement du corps ; le corps est le siège,
en nous, des passions, du désir, des plaisirs ; quand ceux-ci
ne sont pas maîtrisés ou dominés par la raison,
alors, il y a démesure… Cf. Phèdre 238 a
- la tripartition de l’âme : l’âme est composée
de plusieurs parties qui n’entretiennent pas le même
rapport au Bien
Ame
raisonnable (tête) |
Ame
du courage (sous le diaphgrame) |
Ame
des appétits primitifs, des désirs mortels, qui
attire le corps vers les plaisirs terrestres (bas-ventre) |
mise
en nous par les dieux, comme un pilote aux postes de commandement
du navire ; divine et parfaite, elle est immortelle ; elle
seule est capable de connaître la vérité,
car elle seule a pu contempler avant la naissance le royaume
du Bien
Sagesse |
Principe
du courage ; le thumos est capable du meilleur comme du pire,
selon la catégorie d’hommes à laquelle il
appartient |
Plaisirs
physiques et sexuels = causes de la déchéance
de l’homme Tempérance |
Pourquoi l’âme n’est-elle pas unique ? Pourquoi
parler d’une multitude d’âmes ? Parce que cela
serait contradictoire de soutenir qu’une âme immortelle,
divine, pourrait autoriser l’homme à se mal comporter.
On
commet le mal quand on n’utilise pas son intelligence.
II- Solution : la cité
idéale
A-
La méthode : le parallélisme cité/ âme
(cf. livre II 369 b)
Voulant
définir la justice, et savoir si elle est un bien, et si
le bonheur consiste dans la justice, Platon va poser la règle
de sa méthode : il faut rechercher d’abord par quels
moyens un Etat est juste, avant de répondre à la question
de savoir par quels moyens un individu est juste.
Pourquoi
cette méthode ? Est-ce un détour ?
- justification
explicite dans le texte : on comprend plus facilement les grands
ensembles que les petits
- justification
« historique » : pas encore d’individualisme à
l’époque ! pas de distinction vie privée et
vie publique (ce qui fait de vous un individu c’est la cité
à laquelle vous appartenez, c’est l’action en
commun, la vie politique)
- veut
faire comprendre que le bien commun coïncide avec le bien individuel,
que les autres participent à notre propre bonheur ?
- veut
aussi au bout du compte décrire ce qu’est la tâche
politique et donc cité idéale = éducative
NB
: on remarquera que Platon a tout de même d’abord opéré
sa tripartition de l’âme humaine, dans le livre IV !
B-
Qu’est-ce que la justice ? (368b-376c)
Trois
éléments dans cité comme dans âme. Tête,
poitrine, bas-ventre.
La
justice va être définie comme étant l’harmonie
entre les éléments qui composent un tout. La justice
est un déséquilibre, une démesure. Rupture
d’une situation saine et équilibrée.
Individu
et Etat sont semblables, en ce qu’ils ont trois parties ;
ainsi que des vertus qui tiennent aux diverses relations établies
entre ces parties.
1)
dans la Cité
Cf.
origine cité (369b-371e) ; fondements : besoins (principe
: impossible, pour un seul homme, d’exercer plusieurs métiers)
Cf.
origine injustice (372a-p. 124 : nécessité des gardiens)
: plus il y aura de besoins à prendre en compte, plus il
faudra avoir de compétences pour le satisfaire ; dégradation
de cette cité (cf. luxe) ; seconde cité :
a)
pour faire l’examen de la justice dans la cité, il
nous faut interroger la nature d’une cité
Quels
sont les éléments essentiels à l’existence
d’une cité (par opposition, par exemple, à un
groupe de personnes réunies au hasard, et qui ne se soucient
pas les unes des autres) ?
Pas
recherche historique mais hypothétique et idéaliste
: quelles seraient les conditions nécessaires pour qu’une
société puisse exister parmi les individus ?
•
Fondement (369b-c) : association de personnes qui repose sur le
besoin
o On ne peut se suffire à soi-même
o Cela, parce qu’on a des besoins variés
o Donc : il y a société parce qu’on a besoin
d’une spécialisation (partage) de tâches (économie
de marché élémentaire !) –principe de
spécialisation : à une seule personne, il faut une
seule tâche (ainsi, les choses seront mieux faites)
NB
: l’économie est ici liée aux aspects les plus
bas de la nature humaine…
•
nature justice
Fondée
sur le principe de spécialisation. Cf. livre IV, 433 a :
« chacun doit s’occuper de ses propres affaires »…
Chacun
doit rester à sa place. Remplir la fonction qui lui incombe.
Il n’y a justice dans la cité que si chacun remplit,
parmi les fonctions possibles, la sienne propre seulement, c’est-à-dire
celle à laquelle sa nature le dispose le mieux. On répartira
donc les habitants de la cité en classes distinctes (gouvernants,
guerriers, artisans) en tenant compte de leurs aptitudes naturelles
qu’aura su discerner et faire fructifier une éducation
appropriée- à l’exclusion de toute autre considération
comme, par exemple, la richesse.
sagesse |
Gouvernants
parfaits : philosophes, gardiens |
courage |
Guerriers |
désir
|
Travailleurs,
producteurs, artisans |
NB : les classes sont composées de gens qui correspondent
aux parties de l’âme qui dominent en eux
•
Modèle non égalitariste ! (chacun de nous diffère
naturellement des autres)
Cf.
370b : « chacun de nous est naturellement, au départ,
non pas semblable à chacun, mais d’une nature différente,
l’un doué pour l’accomplissement d’une
fonction, l’un pour une autre ».
On
peut ici soupçonner un usage idéologique de la notion
de nature. (C’est naturel, alors, c’est bien –cf.
notion de cosmos chez les Grecs).
Ou
bien on peut dire que c’est nous, occidentaux du 21e siècle,
qui lisons Platon selon nos propres normes, individualistes ! Platon
considérait que l’homme est un être social, ainsi,
il ne s’intéresse pas à ce qui fait l’unicité
d’une personne par rapport à toutes les autres, mais
à ce qui la rend apte à unir ses efforts à
ceux des autres et à coopérer avec eux.
Une
bonne vie ne peut que reposer sur la coopération commune…
b)
origine de l’injustice et modèle de la société
juste (cité idéale) : l’expansion de la cité
•
Dégradation de la cité (le luxe : plus seulement besoins
vitaux)
- serait-ce
un aveu de réalisme ?
•
Les gardiens
o D’abord armée (spécialisée) rendue
nécessaire par l’impérialisme d’une cité
qui doit avoir assez de ressources pour satisfaire les besoins de
ses citoyens
o Nature : férocité et docilité
o 376d-412b
: leur éducation (qu’est-ce que l’éducation
? consiste à dresser l’intelligence à contrôler
les réactions ; elle doit produire les gens attirés
par le bien et rebutés par le mal ; formation du caractère
: à la fois physique et morale
Livre
III
o 412b-427d : Etat juste idéal : trois fonctions essentielles
qui composent l’Etat ; son bien et sa vertu proviennent de
leurs relations
o ils doivent gouverner l’Etat (ce sont les plus aptes…)
- certains n’iront plus loin et seront des guerriers (auxilliaires)
- noble mensonge
o Ensuite moyen d’enlever les éléments malsains
2)
dans l’individu
NB
: il faut ici répondre à la question suivante : pourquoi
le fait que la raison gouverne dans l’âme fait-il de
cette âme une âme juste ? et pourquoi la justice fait-elle
de cette âme une âme épanouie ?
L’accord
entre ces trois parties de l’âme lorsqu’elles
sont réglées harmonieusement se nomme tempérance.
La raison gouverne alors la partie passionnée, qui, en exécutant
ses commandements, soumet à son tout la partie désirante.
Le désir, au lieu de poursuivre ses fins particulières,
se soumet au contrôle des deux autres parties.
Une
personne est juste si chacune de ses parties agit vertueusement
et comme elle le doit (si la raison gouverne). La justice est un
état intérieur de l’individu, l’épanouissement
approprié et harmonieux de tous les aspects de sa personne
(443d). On peut la définir comme l’état qui
assure l’harmonie psychique.
Signification
: La raison gouverne dans l’âme quand une personne agit
en vue d’intérêts et de fins qui portent sur
sa vie considérée comme un tout, sans donner la préséance
aux motivations présentes. Il faut se décider, non
en vue de leur intensité immédiate, mais de leur signification
à long terme.
Etre
injuste c’est donc avoir l’âme en désordre
NB
: Socrate dépeint ici un homme juste indépendamment
des actes justes… L’homme juste est lui-même la
norme du juste : il identifie l’action juste en se référant
à cet état d’harmonie psychique, et non à
une liste de devoirs qui serait acceptée d’une source
extérieure.
3)
La justice, l’origine et la condition des vertus
Bref,
la justice, qui réside dans l’ordonnancement convenable
des choses, est donc, chez Platon, le principe commun qui fait naître
et permet d’exercer les vertus de tempérance, de courage
et de sagesse qui sont nécessaires pour rendre la Cité
parfaite.
NB
: Il faut bien remarquer que justice sociale et justice individuelle
s’entremêlent sans cesse, sont intriquées l’une
dans l’autre. Elles sont chacune condition de possibilité
de l’autre.
La
cité ne peut être juste que par la justice des individus
qui la peuplent et la dirigent . Pour que la justice règne,
il faut que nous soyons tous moraux.
4)
Critiques, ou difficultés de cette thèse :
a)
Normalement, justice a à voir avec la relation de chacun
avec les autres.
Ici,
une cité juste ne l’est pas par la relation qu’elle
entretient avec d’autres cités, mais par la relation
des trois parties qui la composent.
L’individu
est juste selon son état intérieur, et pas selon son
comportement avec les autres ! ? Pourquoi serait-on juste pour la
seule raison qu’on fait des projets pour sa vie considérée
comme un tout, au lieu de satisfaire ses désirs au gré
de leur venue ?
b)
on peut être juste en ce sens et pourtant faire main basse
sur le bien d’autrui
On
peut d’ailleurs penser à une telle personne sans immédiatement
se dire qu’elle ne fera jamais le mal ; sans se dire qu’elle
n’est pas égoïste, etc. !
c)
Dans la cité juste, seuls les Gardiens sont justes ! ?
But
cité ou politique = éducation morale ! Or, finit par
abandonner celle de tous mais seulement des gardiens et au bout
du compte, les citoyens seront presque tous justes… de mauvais
gré !
Seul
recours au final : la tromperie de la part de celui ou ceux qui
gouvernent, cf. communisme et noble mensonge ! ! ! Noble mensonge
: nous avons une nature commune, car nous sommes tous enfants de
la terre, tout en étant différents (on contient différents
« métaux »)
Conclusion
: la justice est-elle « payante » ? est-elle quelque
chose qu’il vaut la peine de posséder en elle-même
?
Oui,
car elle répond à ce qui dans la nature humaine est
important : elle est l’assouvissement des besoins fondamentaux
de chacun (mais attention ! cela ne signifie pas du tout qu’elle
réponde à tous les désirs que chacun peut avoir
à un moment donné).
C-
Condition de possibilité ultime de cette Cité idéale
et de la réalisation de la justice autant dans la cité
que dans l’individu : le communisme (III, IV), le philosophe-roi
1)
le communisme (description de la cité juste)
- collectivité
de la propriété
- suppression des familles nucléaires
But
: renforcer l’unité de la société (pour
lui, une cité est une unité dans laquelle il n’y
a pas de groupes en conflit radical), habituer les gens à
considérer leurs intérêts propres comme étant
les mêmes que l’intérêt du tout. (NB :
Platon veut tout simplement supprimer les conflits d’intérêts,
non pas les prendre en charge).
2)
le philosophe, ami de la vérité et de la sagesse
(fin V, VI, VII)
- fin
livre V : à quoi reconnaît-on un philosophe ?
- livre VI : le philosophe doit gouverner ; qu’est-ce que
le naturel philosophe ? celui qui sait et qui se conduit bien ;
conception moraliste de la vérité ou intellectualisme
moral
- livre VII : allégorie de la caverne ; programme d’études
du philosophe (à partir de la page 280)
3)
critique de la démocratie (livres VIII et IX)
En
effet, la thèse selon laquelle le philosophe doit gouverner,
implique que la politique est objet de science, et une critique
du gouvernement populaire (cf. p. 251 : il est impossible que le
peuple soit philosophe).
Ainsi,
dans le livre VIII, Platon montre bien que la démocratie
est une des maladies qui affecte la cité idéale.
De
quoi s’agit-il dans le livre VIII ? Analyse des cinq formes
de gouvernement et pourquoi nécessairement chacune d’entre
elles finit toujours par dégénérer. Chaque
forme de gouvernement correspond à un type d’homme/
d’âme. But de cette analyse : répondre à
la question de savoir si la justice et l’injustice agissent
sur le bonheur et le malheur de l’individu.
Cf.
557 b : définition de ce gouvernement : liberté/ licence.
Type d’hommes : très variés, parce que chacun
vit comme il lui plaît. Anarchie dans les désirs.
A la
fin du livre VIII (562a sq), Platon montre que la démocratie
finit toujours par se transformer en tyrannie. Elle porte donc celle-ci
en germe. L’homme démocratique est voué à
devenir un tyran.
III-
Réponse à question liens justice-bonheur : l’homme
le plus injuste est aussi le plus malheureux
NB
: Platon décrit différents types d’hommes injustes
dès le livre VIII. On y voit ce qui arrive quand la raison
ne gouverne pas dans l’âme, et quand cette dernière
est dominée par le désir.
A-
Le tyran (livre IX)
- cf.
question directrice de l’œuvre : être juste rend-il
heureux ? ou bien être heureux consiste-t-il à satisfaire
tous ses désirs (ce qui est la même chose qu’être
injuste) ?
- Cf. fait que le propos de Socrate est de montrer qu’il est
payant d’être juste et que l’injustice entraîne
la misère intérieure ; or, le tyran (celui qui exerce
injustement un pouvoir absolu) = l’opposé de l’homme
juste
- La conception eudémoniste du bonheur
- La tripartition platonicienne de l’âme et la place
des désirs
•
Le tyran, esclave de ses désirs et donc de lui-même
D’abord, le tyran est celui qui ne trie pas ses désirs.
Ensuite, un seul désir devient dominant, Eros. L’âme
du tyran est l’esclave d’un seul désir dominant,
l’Eros, qui engendre un état de besoin insatisfait
chronique, aucune partie de l’âme ne pouvant accomplir
sa fin propre. L’âme du tyran est gouvernée par
une partie qui n’a aucune idée de son bien propre,
ni de celui de l’âme considérée avec toutes
ses parties. Loin d’obtenir ce qu’il veut, c’est
le contraire qui se produit.
•
Le tyran, esclave des dominés
Le tyran est incapable d’amitié, de confiance. Se méfie
de tout le monde. C’est un être terrorisé par
les autres !
B-
Le mythe d’Er (fin livre X)
Deux
problématiques :
• Quel genre de récompenses peut attendre l’homme
juste
• Sommes-nous libres ou déterminés ? Si nous
sommes méchants, est-ce de notre faute ?
• Question du choix de vie
Plan
de la fin du livre X :
1) 608c-612a : preuve de l’immortalité de l’âme
2) 612a-614a : les récompenses de l’homme juste dans
cette vie
3) 614a-621d : les récompenses de la justice dans l’au-delà
Dans
cette dernière partie, Platon cherche à montrer que
les récompenses de la justice dans cette vie sont d’une
importance mineure en comparaison de celles qui attendent l’âme
après sa mort.
Mythe
d’Er : un homme, à qui il a été permis
de voir le monde souterrain et d’en revenir, raconte ce qui
arrive après la mort. Les âmes sont récompensées
au ciel ou punies dans le monde souterrain en fonction des actions
accomplies par la personne sur terre ; après un laps de temps
défini, elles s’incarnent à nouveau et choisissent
la vie qu’elles vont mener. La façon dont elles se
prononcent dépend des options disponibles (elles ne peuvent
choisir que parmi un nombre limité de vies), et aussi de
la manière dont elles ont su tirer la leçon de leurs
incarnations précédentes, et de leurs résultats.
Problème
: n’est-il pas vain d’essayer d’être juste
dans un tel univers, dans lequel justice et injustice s’équilibrent
?
•
les gens très malfaisants sont torturés éternellement,
sans jamais s’améliorer ; le monde souterrain de Platon
est un Enfer sadique, pas un purgatoire (pas d’amélioration
possible ?).
• même en vivant le plus justement possible, on pourra
être injuste dans une vie future
Signification
: cf. « chacun est responsable de son choix, le dieu est hors
de cause » ; veut montrer que l’homme forge son caractère,
mais qu’en même temps, ce caractère pèse
sur lui.
Ce
mythe dramatise les enjeux des choix que nous devons effectuer maintenant.
P. ne suggère pas sérieusement que nous avons vécu
d’autres vies et subi leurs conséquences au ciel comme
en enfer, mais seulement que nos décisions, bien qu’elles
reflètent forcément le caractère que nous avons
déjà (620a), reflètent également la
conscience que nous avons du genre de vie que nous choisissons de
vivre, et de ses résultats.
Les
choix que nous faisons de jour en jour déterminent le genre
de personnes que nous sommes, et une personne sage choisira en gardant
cela à l’esprit. Les choix que nous faisons nous rendent
responsables de ce que nous sommes. Nos choix peuvent dans une certaine
mesure s’expliquer par nos vies passées, qui n’étaient
pas entièrement sous notre contrôle et sont limitées
par de nombreux facteurs ; mais, en dernière instance, la
décision nous appartient et nous ne pouvons jeter le blâme
sur personne d’autre. Il nous faut vivre avec ses conséquences.
Pourquoi
pas de déterminisme ? (cf. tirage au sort qui détermine
notre ordre de passage) Parce que :
•
le nombre de vies est très largement supérieur à
celui des âmes présentes
• « même pour les derniers venus, s’ils
font un choix sensé et persévèrent dans la
vie choisie, il est une condition aimable et point mauvaise »
Si
l’homme bon n’échappe pas toujours au mal, c’est
que l’amour de la sagesse n’est pas une garantie de
salut face aux problèmes et aux tragédies de la vie.
Problèmes
ultimes :
•
on choisit une fois pour toutes la vie qu’on va mener ! Pourquoi
ne pourrions-nous pas être ce que nous choisissons d’être
à chaque instant ? –En tout cas, le choix est irrévocable.
• Platon nous persuade finalement d’être juste
seulement en nous montrant que c’est payant ! La justice n’est
donc peut-être pas bonne pour elle-même si on ne trouve
aucun argument véritablement convaincant !
Conclusion
: Comparaison avec Machiavel (rapports politique et morale)
Le
Prince de Machiavel est, contrairement à la République,
une conception réaliste de la politique. Le Prince est un
ensemble de conseils destinés à celui qui veut prendre
le pouvoir, et le maintenir. L’art politique consiste à
sauvegarder l’Etat, à le maintenir dans la durée.
Pour M., cela nécessite une approche pragmatiste de la politique.
Cf. chapitres 15 à 18.
• Il faut tenir compte de la nature humaine (ne pas vouloir
la changer)
• L’espace social et politique est celui de l’apparence
; le prince doit se soucier de son image (il ne faut pas la fuir
!)
• Les vertus politiques ne peuvent pas s’aligner sur
les vertus privées :
• Ce serait la perte de l’Etat, la non reconnaissance
de ce qu’est la politique (vouloir se soucier du salut de
son âme est incompatible avec le fait de gouverner car parfois
il faut avoir le courage de prendre des décisions immorales,
si l’intérêt de l’Etat l’exige) ;
cf. Max Weber, Le métier et la vocation de savant (1919)
• La seule valeur est celle de la conservation du pouvoir,
l’efficacité ; en politique, il n’y a que le
résultat qui compte
• Cf. chapitre 18 : « il faut savoir user de la bête
» : se montrer tantôt lion, tantôt renard (force
et ruse) ; il n’est pas toujours nécessaire ni souhaitable
d’être moral ; il faut le paraître par contre
!
• Attention : Ce n’est pas du tout du « machiavélisme
»! le prince n’est pas un tyran qui satisfait seulement
son intérêt propre
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