Sujets
- Peut-on
convaincre autrui qu’une œuvre d’art est belle ?
- Qu’est-ce
qui distingue une œuvre d’art d’un objet technique ?
- L’art
modifie-t-il notre rapport à la réalité ?
Concepts,
problèmes
Art,
technique, travail : 1) type d’activité humaine :
tout ce par quoi l’homme met son empreinte dans quelque chose, fait
un monde humain : s’oppose alors à la nature (cf. termes d’artifice,
« artefact ») ; 2) type d’objet : quelque chose
de fabriqué par l’homme (œuvre). On distingue en général
l’art du travail ou de la technique en ce qu’il n’a aucun but utilitaire
et fabrique des objets beaux, destinés à nous procurer un certain
plaisir (à « nous plaire »).
Le
beau :
Problème n°1
: le beau est-il une caractéristique de l’objet, ou de notre esprit ?
Réponse de la philo moderne, représentée surtout par Kant :
le beau est quelque chose de subjectif, i.e., il caractérise
l’effet que fait sur nous un objet. Il appartient donc à notre esprit
plutôt qu’aux choses.
Dès
lors, problème n°2 : comment s’entendre sur la beauté de quelque
chose (et surtout, d’une œuvre d’art)?
Attention :
le beau n’est pas propre aux œuvres d’art ! cf. définition
kantienne, ci-dessous. D’ailleurs, le beau n’est vraiment plus la
caractéristique majeure des œuvres d’art aujourd’hui.
Jugement
de goût/ esthétique : quand nous jugeons que quelque chose
est beau.
Le
génie : talent artistique ; capacité à produire des
œuvres sans suivre de règles, par une inspiration ; mais ne
produit pas n’importe quoi : on imite le génie (le génie « fait
école »). Conséquence : l’art n’a rien à voir avec une
connaissance, ou avec la science, puisque celui qui fait une œuvre
d’art ne sait pas comment il fait ce qu’il fait, et ne peut donc
enseigner aux autres comment faire ce qu’il a fait… Renvoie à la
création, et non à la fabrication (qui suppose des règles)
Fonctions
de l’art :
1)
exprimer une vision du monde (celle de l’artiste, ou d’une
civilisation, d’une société –la première renvoie à l’individualité,
elle est consciente ; pas la seconde : c’est après-coup
qu’on dira qu’elle renvoie à une certaine vision du monde, i.e.,
manière de vivre, de considérer le monde, etc.) ;
2)
manifester quelque chose d’invisible à l’œil nu : l’art
rompt alors avec le quotidien ; soit on dit que c’est a) une
nouvelle manière de regarder la réalité (dans la vie quotidienne,
on a un rapport utilitaire aux objets, et on ignore alors certaines
de ces caractéristiques), soit que b) il nous fait accéder à un
autre monde ou à des choses que sans cela on ne pourrait jamais
« dire » (Dieu, la mort, etc.)
Textes
/ auteurs
Platon :
République, livre X : l’art, imitation de la
réalité sensible, est tromperie car seul le monde des Idées est
réel, or, la réalité sensible=monde des apparences ; l’artiste,
ignorant (ignore ce qui est vraiment). L’art s’oppose ici à la philosophie,
synonyme de science, de connaissance, et à l’absolu, au monde véritable
(car la connaissance véritable a pour objet le monde véritable…–point
commun aux deux : la vérité). NB : cela suppose
que l’art est imitation de la nature, ce qui ne va pas de
soi.
Hegel :
l’art est un moyen sensible d’accéder au vrai (qui dit sensible,
dit inférieur, à la philosophie/ science –inférieur car pas clair)
Aristote :
distinction entre plusieurs types d’activités humaines : a)
activité en vue d’une fin (poiésis) –synonyme de fabrication, de
technique, de production ; b) action morale et politique (praxis) ;
c) connaissance pure (théoria). Chez Aristote, l’art, comme le travail
ou l’artisanat, fait partie de b). Rien ne distingue l’artiste du
boulanger… Problème pour nous, contemporains : l’art est alors
du côté de l’utile, ce qu’il n’est plus pour nous… Et puis, les
objets d’art sont pour nous bien à part des objets techniques
Kant :
Critique de la faculté de juger : définition
de la beauté comme subjective (cf. ci-dessus). Caractères de la
beauté :
-
procure un plaisir esthétique = désintéressé
(on ne prend plaisir qu’au spectacle de la chose, on ne veut pas
la posséder : cf. contemplation d’une nature morte : rien
à voir avec le plaisir de manger)
-
universalité subjective : tout en exprimant ma
propre satisfaction, le jugement « c’est beau »
prétend valoir pour tout le monde ; prétend, car s’il
valait vraiment pour tout le monde, il serait un jugement de connaissance,
i.e., vrai ou faux ; dès lors, on pourrait démontrer la valeur
de notre jugement, et on n’aurait qu’à s’incliner devant cette démonstration,
ce qui n’est pas le cas ! Par contre, la beauté permet aux
hommes la discussion (ce qui suppose que le beau n’est pas
entièrement subjectif, puisqu’il nous permet de nous rencontrer :
c’est pourquoi le beau est un « universel subjectif »
-NB : normalement, la subjectivité désigne ce qui nous est
vraiment propre, ce qui nous enferme en nous-mêmes). Sans être scientifique,
le jugement de goût est donc objectif.
-
finalité sans fin : est beau ce qui donne l’impression
d’avoir été produit en fonction d’une intention (on dit alors que
la chose a une signification : quelqu’un a voulu dire
quelque chose); mais on ne peut en donner précisément la fin (qu’est-ce
que ce quelqu’un a voulu dire par là ?). Cf. ci-dessus, notion
de génie. Signifie que le beau est indéfinissable (et, de nouveau,
qu’il n’est pas une connaissance).
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